Il est vrai que les matières organiques vont se décomposer, peu importe le traitement auquel elle est soumise. Toutefois, ça ne veut pas dire que, dans les deux situations, sa décomposition aura le même impact. Il y a une différence énorme entre une matière organique qui est compostée et une autre qui serait envoyée à l’enfouissement.
Pour commencer, les matières organiques peuvent se décomposer dans un environnement aérobique (c’est-à-dire en présence d’oxygène) ou dans un environnement anaérobique (en absence d’oxygène). Dans un environnement aérobique, une plate-forme de compostage, par exemple, la matière organique qui se décompose dégage la majorité du dioxyde de carbone (CO2) qu’elle a consommée par photosynthèse durant sa vie. Dans un environnement anaérobique – un site d’enfouissement -, la matière organique subit un processus de putréfaction différent qui résulte en des émissions de méthane (CH4). Le méthane, tout comme le dioxyde de carbone, est un gaz à effet de serre qui contribue aux changements climatiques. Toutefois, le méthane a un potentiel de réchauffement (une capacité à emmagasiner la chaleur) qui est environ 28 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone. Sa contribution aux changements climatiques est donc très nettement supérieure. En d’autres mots, le fait d’envoyer des matières organiques à l’enfouissement a le potentiel de contribuer davantage aux changements climatiques.
Il faut toutefois ajouter un bémol à cette dernière information; les sites d’enfouissement ont des systèmes de collecte des gaz émis par la décomposition des matières organiques. D’ailleurs, une fois purifié, le méthane issu de l’enfouissement peut être utilisé comme gaz naturel. Malgré, ces mesures de compensation, il y a au moins deux autres grandes raisons d’éviter d’envoyer les matières organiques à l’enfouissement.
Premièrement une partie du méthane émis par les matières se trouvant dans les sites d’enfouissement n’est pas capté par les systèmes en place. Le méthane qui est émis ainsi contribuera donc aux changements climatiques. Pris autrement, malgré l’utilisation d’une partie du méthane comme énergie, l’enfouissement demeure climatiquement plus dommageable que le compostage.
Deuxièmement, en envoyant les matières organiques à l’élimination, on ne peut plus les utiliser comme amendement organique, elles sont tout simplement perdues. La simple production de méthane à partir de matières organiques ne constitue pas non plus une forme de recyclage de cette matière. Pour être recyclée ou valorisée, la matière organique doit être réintroduite dans le sol. Sous forme de compost, la matière organique contribue notamment à la régénération des terres agricoles, en les aidant à se structurer et en leur apportant des engrais comme l’azote, le phosphore ou encore le potassium.
Au-delà des gaz issus de la décomposition, c’est donc aussi la matière elle-même qui est perdue dans l’enfouissement. En se privant ainsi d’une source d’énergie importante pour la production de nouveaux végétaux, on se prive, entre autres, de ressources qui peuvent contribuer à la sécurité alimentaire du Québec.
Bref, bien trier ses matières organiques à la maison, c’est très important pour la lutte aux changements climatiques et pour la préservation de nos ressources. Loin d’être anodin, ce petit geste peut faire la différence entre une matière organique qui nuit à la qualité de notre environnement et une qui, à l’inverse, peut nous bénéficier.